Si les grandes avitaminoses de naguère ont disparu, on constate des mini-carences fréquentes.
Et divers signes permettent de les soupçonnez. Raison de plus pour y veiller : un bon capital vitaminique nous protégerait de certains cancers.
Lorsque Napoléon décida, en 1809, sur le conseil de ses médecins, qu'aucun navire ne prendrait plus la mer sans une provision de citrons, on ignorait encore tout des vitamines. On avait constaté que les agrumes protégeaient d'une maladie mortelle (le scorbut), frappant essentiellement les équipages durant leurs voyages au long cours.
Mais les connaissances médicale n'allaient pas plus loin. C'est, dans une certaine mesure, Louis Pasteur qui, par ses travaux sur les microbes, allait involontairement mettre le monde scientifique sur la voie de ces précieuses petits substances.
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On crut d'abord, avec Pasteur, que les microbes dont il venait de découvrir l'existence étaient responsables de toutes les maladies.
Par mesure de précaution, on pratiqua donc une stérilisation intensive. Du lait, en particulier. Et des milliers d'enfants furent frappés de scorbut infantile. On comprit alors que le lai cru contenait quelque chose de vital qui disparaissait du lait bouilli trop longtemps.
Peu après, on allait constater que le lait frais n'était pas seul à posséder cette propriété : l'enveloppe des grains de riz, elle aussi...
C'était en 1886, aux Indes néerlandaises. Subitement, une épidémie de béri-béri se déclara au sein de l'armée. Le gouvernement hollandais expédia immédiatement deux médecins, Eijkman et Grijns, pour tenter de juguler cette affection, que l'on croyait alors d'origine microbienne.
Or, dans la cour de l'hôpital,il y avait un poulailler ; pour essayer de trouver un remède, après l'avoir testé par prudence sur l'animal, les deux médecins tentèrent d'inoculer la maladie à certaine des poules. En vain : les volatiles demeuraient en parfaite santé. Jusqu'au jour où toutes les poules, aussi bien celles que les deux médecins avaient essayé de contaminer que les autres, furent subitement paralysées – ce qui est l'un des premiers symptômes du béri-béri.
Peu après : nouvelle surprise ! Les volatiles venaient de guérir sans avoir bénéficié d'aucun traitement.
Grijns et Eijkman apprirent alors que les poules, habituellement nourries au riz complet, avaient été alimentées – faute d'approvisionnement – pendant quelques jours avec du riz poli, comme les soldats de l'armée. Puis, un nouveau stock de riz complet étant arrivé, on avait repris le régime habituel.
La maladie, de même que la guérison spontanée, ayant coincidé avec ces changements de nourriture, le doute n'était plus permis : l'enveloppe de riz contenait bien « quelque chose » de vital, dont l'absence provoquait le béri-béri.
Mais il fallut attendre 1912, pour qu'un chercheur polonais, du nom de Funk, isole cette « chose ». Il l'appela d'abord « amine » et, puisqu'elle protégeait la vie, la rebaptisa « vitamine ».
A cette vitamine B1, anti béri-béri – découverte dans l'enveloppe du riz -, à la vitamine C, anti-scorbutique -, isolée peu après – sont venues s'ajouter successivement onze autre amines indispensables à la vie, appelées pour la même raison vitamines : notamment, la A, dont on avait constaté que la privation pouvait provoquer de graves lésions aux yeux ; la PP dont la carence est responsable d'une maladie mortelle (la pellagre qui existait depuis des siècles sans qu'on en décèle la cause : la D, antirachitique...
De nos jours, des maladies carentielles graves comme le béri-béri, le scorbut, la pellagre ont quasiment disparu.
Une alimentation variée nous met à l'abri de ces fléaux, en apportant les vitamines essentielles au fonctionnement de l'organisme et à sa croissance.
Cependant, de nouvelles données ont fait apparaître des hypovitamioses (déficit en vitamines) dans des pays qui s'en croyaient protégés, comme les Etats-Unis et la plupart des pays d'Europe, dont la France.
Les cas où il faut être très vigilant
Selon cette étude, celles qui manquent le plus fréquemment sont : les vitamines B1, B9, C, B2 et E. D'autres études menées depuis ont fait apparaître également des déficits en vitamines B5, et A. Déficits qui s'observent particulièrement à certains âges de la vie et dans certaines circonstances.
-Ils peuvent venir d'un déséquilibre alimentaire, situation à laquelle exposent tous les régimes amaigrissants.
-Ils peuvent être dus à une mauvaise absorption des vitamines par l'organisme ; c'est le cas des fumeurs, des individus atteints d'alcoolime, de gastrites.
-Ils peuvent être provoqués par une augmentation des besoins : l'enfant en période de croissance, la femme enceinte, le convalescent.
-Enfin, les carences s'aggravent souvent du fait d'un certain nombre d'erreurs diététiques. Ainsi les pommes de terre chutent de 40 mg de vitamine C pour 100 g, à 4 mg lorsqu'elles sont cuites sans précautions.
Les trempages excessifs ne valent guère mieux : il suffit de laisser des petits pois dix minutes dans l'eau, pour qu'ils perdent un tiers de leurs vitamines B et C. Fruits et légumes coupés et exposés à la lumière subissent le même sort...
A défaut de dosage, certains indices peuvent nous aider à soupçonner une insuffisance plus précise de telle ou telle vitamine.
Et même s'il ne s'agit que de mini déficit il faut y veiller : notre souci actuel n'est plus seulement de survivre sans carence, mais de fonctionner au maximum de nos possibilités et de prévenir les maladies.
Or, les vitamines jouent un rôle essentiel à cet égard. Plusieurs études montrent même que certaines d'entre elles exercent une action protectrice contre divers cancers. Notamment celui du poumon.
Gencives fragiles : attention à la C
La baisse de l'appétit, la fatigue, les troubles du sommeil (qu'ils s'agisse d'insomnie ou d'hypersomnie), les saignements des gencives, peuvent faire penser à une insuffisance en vitamine C.
D'autant plus à surveiller qu'elle entraîne souvent une anémie par manque de fer. La vitamine C est, en effet, nécessaire à l'assimilation du fer contenu dans les légumes et les fruits.
Si le fer apporté par la viande et le poisson – appelé fer hémitique – est facilement absorbé par l'organisme, il ne constitue que 10 à 15 % du fer fourni par l'alimentation. Le reste provient des céréales, des fruits, des légumes ; mais il s'agit d'un fer dit « non hémitique » et son absorption par la muqueuse intestinale est faible.
« Or, la vitamine C transforme chimiquement ce fer « non hémitique » en sel ferreux et le maintient en solution, ce qui permet son absorption au niveau du duodénum », expliquent les chercheurs. Il suffit, par exemple, de boire un jus d'orange contenant 70 mg de vitamine C pour tripler l'absorption de fer. Et des légumes particulièrement riches en vitamine C, comme le chou-fleur, peuvent aller jusqu'à quintupler.
Raison supplémentaire pour surveiller la vitamine C : elle favorise la formation d'une hormone qui stimule des défenses de l'organisme.
Certaines personnes doivent être particulièrement vigilantes, notamment celles qui fument. La vitamine C a un ennemi : le tabac, qui diminue son taux dans l'organisme. Si vous fumez un paquet de cigarettes par jour, vos besoins en vitamine C doublent (au lieu de 80 mg par jour, il vous en faut environ 140), et il faut également surveiller votre consommation de provitamine A, car l'une et l'autre ont une action préventive contre le cancer du poumon.
La vitamine A joue un rôle important dans les mécanismes de la vision, mais aussi dans la régénérescence de la couche profonde de la peau. Sa carence totale entraîne une maladie très grave (la xérophtalmie), qui rend aveugle.
Cette maladie n'existe pas en Europe, mais un déficit en vitamine A peut provoquer une baisse de la vision, des migraines, une sécheresse de la peau et, simultanément, la formation de points blancs ou de points noirs en abondance.
Enfin, de nombreuses études ont mis en évidence le rôle de la vitamine A dans la prévention du cancer des fumeurs.
Mais, attention ! Seule la vitamine A procurée parles fruits et les légumes aurait cette action protectrice. La vitamine A existe, en effet, sous deux formes : le rétinol, d'origine animale, fourni essentiellement par le beurre cru. Et le carotène (qui se transforme en vitamine A dans l'organisme) apporté par certains fruits et légumes. En tête : le persil, la carotte, les abricots.
Nerfs à fleur de peau, attention à la B1
Les vitamines du groupe B – et particulièrement la B1 – concourent à la formation des gaines qui entourent et protègent les nerfs.
Le déficit en vitamines B est source de douleurs inexpliquées, au pire de polynévrites (inflammation des nerfs). Les trous de mémoire, la nervosité (associée ou non aux douleurs) doivent orienter plus précisément vers un déficit en vitamine B1. Surtout chez ceux qui boivent un peu plus qu'ils ne le devraient.
L'alcool est un destructeur de plusieurs vitamines, en particulier la B1. Et cela pour plusieurs raisons.
D'abord, il fournit des calories vides, dépourvues de vitamines. Ensuite, il diminue l'absorption des vitamines contenues dans les autres aliments. Enfin, en fatiguant le foie, il diminue ses capacités de stockage des vitamines. Cela dit, les alcooliques ne sont pas seuls à souffrir de carences en vitamine B1.
Langue rouge : attention à la B2
On l'a confondue avec la vitamine B1 jusqu'en 1926, date à laquelle – grâce aux travaux conjugués de Scindell aux Etats-Unis et de Mme Randoin, en France – on s'aperçut que, en fait, dans la substance découverte par Funk en 1910, il y avait deux substances ayant des actions différentes.
On appela la première thiamine ou vitamine B1, et la seconde riboflavine, ou vitamine B2, sans encore savoir à quoi cette dernière servait.
Quelques année plus tard, on découvrit que cette riboflavine était le précurseur de deux enzymes indispensables à la respiration de toutes les cellules de l'organisme.
Le déficit en vitamine B2 se manifeste sur la peau, la langue et les yeux. Ces derniers rougissent et larmoient. La peau des angles du nez et celle du menton devient grasse et irritée. Enfin, la langue prend une tonalité rouge vif.
Mais ces manifestations peuvent exister épisodiquement, isolèment en cas de mini-carences, quand les apports alimentaires sont insuffisants et les besoins amplifiés : pendant la grossesse et l'allaitement.
Surtout si l'on suit un régime quasi végétarien en même temps. Le poisson, la viande et les œufs sont les aliments les mieux pourvus en vitamine B2. Suivent le lait, le fromage et les champignons. Les céréales, fruits et légumes n'en contiennent pas beaucoup. Il faut saoir également que si la riboflavine est l'une des vitamines qui résistent relativement bien à la chaleur, elle est extrêmement sensible à la lumière. C'est pourquoi le lait, qui en est riche, est vendu dans les cartons ou des bouteilles opaques.
Bobos qui traînent : pensez à la vitamine B5
On sait depuis longtemps qu'une cicatrisation rapide est un signe de bonne santé et qu'un bobo qui traîne peut signaler un manque de vitamines.
Plusieurs études orientent aujourd'hui vers une vitamine plus précise : la B5 r(ou panthénol) plus connue jusque-là pour son action contre la chute des cheveux.
Sans entrer dans le détail des travaux qui ont dirigé les chercheurs vers cette vitamine, sachez que les Américains ont provoqué des lésions de la peau chez des rats en leur donnant une nourriture privée de panthénol. Et des études françaises de cette même vitamine stimulait la cicatrisation.
Par la suite, on a constaté que de simples applications locales de crème à base de vitamine B5 pouvaient hâter la guérison des crevasses des mamelons, fréquentes chez les mamans qui allaitent, et celle des irritations des fesses des nourrissons. Explication : cette vitamine stimulerait les cellules de réparation de la peau, ou fibroblastes.
Triste et anxieux : souvent un manque de B9
La tristesse sans raison est parfois due à une carence en vitamine B9 (ou folates). En particulier, on tient désormais la baisse du taux de folates pour principal responsable des crises de cafard et de « déprime » qui suivent souvent un accouchement.
On a découvert, en effet, que les femmes enceintes avaient fréquemment un capital de B9 insuffisant, surtout en fin de grossesse ; car le fœtus est avide de cette vitamine, et il épuise les réserves maternelles.
Ce sont les travaux d'un chercheur canadien qui ont éveillé les soupçons : les dosages sanguins qu'il avait pratiqués montraient, au moment de l'accouchement, une carence importante chez 75 % de ses patientes. Il a tenté un traitement à la vitamine B9. Et cela a été un succès : 83 % des patientes déprimées ont retrouvé le moral.
Après ce premier résultat plein de promesses, la recherche s'est orientée vers l'utilisation de la vitamine B9 pour traiter la dépression en général, et il s'est avéré qu'elle donnait souvent d'excellents résultats, particulièrement chez les personnes âgées.
Ainsi, des gérontologues ont constaté qu'il suffit parfois d'un petit supplément de folates pour redonner à une octogénaire triste et indifférente un certain goût de vivre.
E : la vitamine de la jeunesse
Parmi les vitamines qui manquent souvent : la E. Et, bien qu'on en parle généralement moins que de la A, elle joue un rôle important dans notre organisme. Elle est destinée à « neutraliser » des molécules chimiques extrêmement toxiques pour nos cellules, puisqu'elles s'attaquent à leurs parois et les détruisent. Il s'agit des radicaux libres. De plus, en améliorant la digestion des matières grasses, elle prévient, dans une certaine mesure, leur dépôt sur les artères.
Des expériences de laboratoire ont montré que des rats soumis à une alimentation riche en vitamine E vivaient plus longtemps et en meilleure santé que la moyenne de leurs congénères.
Enfin, plusieurs études ont montré qu'elle aurait (comme la vitamine A et la vitamine C) une action préventive contre le cancer. Sa carence n'est pas facile à déterminer, mais soyez vigilant si vous mangez beaucoup de surgelés. Alors que toutes les autres vitamines résistent parfaitement au froid, la vitamine E fait exception : elle supporte mal la congélation. Pour pallier, il suffit de manger, par ailleurs, des aliments frais qui en sont riches.
Certaines huiles poly-insaturées (soja, maïs et germe de blé) en sont abondamment pourvues. De même les noisettes, les noix, les amandes et, dans une moindre proportion les bananes, les choux, les salades.
Reste la question clé : suffit-il de veiller à son alimentation pour s'assurer un bon capital vitaminique ? Ou est-il plus sûr d'adopter la solution "suppléments en boîte" ?
La première chose à faire est de rééquilibrer son alimentation : adopter une nourriture aussi diversifiée que possible, et évier les erreurs de préparation.
Le piège des tables de vitamines
Exemple : la vitamine C se trouve en abondance dans le persil, le cassis, les légumes frais (tomates, choux), les fruits (oranges, citrons, fraises), les pommes de terre.
Reste à considérer sa fragilité. Ses ennemis sont l'air, l'eau, la chaleur.
Les tables de vitamines n'en tiennent pas compte et elles sont trompeuses. A les regarder, le chou est une source incomparable de vitamine C. C'est vrai pour celui qu'on vient de cueillir, mais au bout d'une semaine, il n'en contient presque plus.
Autres exemples : le cassis et le persil sont, sur le papier des « mines » fantastiques de vitamine C, mais que signifient leurs 140 mg aux 100 g pour l'un, et 200 mg pour l'autre, alors qu'on n'en mange que dix grains ou quatre brins ?
En revanche, les oranges et les pamplemousses, apparemment moins riches, mais absorbés en plus grande quantité et préservés de la déperdition par leur peau, en sont une source importante.
Rappelez-vous aussi qu'une conserve de petits pois contient plus de vitamines que des petits pois frais, pas très « frais ».
Les surgelés sont tout aussi riches en vitamines (exception faite pour la vitamine E) que des aliments frais. Mais attention à la décongélation : on trouve d'importantes quantités de vitamine B dans le jus de viande qui s'échappe pendant la décongélation.
L'épluchage, le lavage et la cuisson des aliments provoquent toujours une certaine perte de vitamines qui peut être multipliée par des erreurs.
Ne les lavez qu'au moment de les consommer, rapidement, et sans les couper : l'habitude qu'on certaines ménagères de rincer les frites avant de les cuire, par exemple, détruit une grande partie des vitamines.
- Pelez-les le plus fin possible et mangez-les aussitôt.
- Cuisez les légumes entiers, voire dans leur peau.
- Plongez-les dans l'eau bouillante et dans un minimum d'eau.
- Cuisez-les à couvercle fermé.
- Ou, mieux encore, à l'étouffée.
- Evitez les ébullitions longues.
- L'eau de cuisson d'un chou contient souvent plus de vitamines que le chou lui-même.
Méfiez-vous du bicarbonate qu'on utilise parfois pour préserver la couleur des légumes : il détruit les vitamines C et B1.
Un conseil concernant le pain : ne le faites pas griller.
La cuisson supprime déjà 15 à 30 % de la vitamine B1. Si vous le faites griller, vous en détruirez 30 % de plus.
Mieux vaut griller la viande que la frire ou la rôtir. Elle conserve de 10 à 30 % de vitamines de plus.
Cela étant, le recours à des compléments vitaminiques peut être indiqué dans certains cas. Et la meilleure des solutions est de consulter un médecin spécialisé qui adaptera votre supplément à vos réels besoins.
Un conseil d'autant plus nécessaire que chaque sujet est différent de son voisin dans ses besoins et son assimilation des vitamines...
Les dosages dépendent aussi de votre âge, de la pilule contraceptive que vous prenez ou non, du tabac, du bébé que vous prévoyez... En outre, il est toujours préférable de consulter son médecin avant d'en prendre, afin d'éviter tout risque de surdosage, qui peut être à l'origine de troubles divers.
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